En Italie, la révolution continue !

Uffizi Leonard de Vinci Battaglia di Anghiari(copie Tavola Doria)La « Révolution du tourisme culturel » portée par Matteo Renzi et son ministre de la Culture et du Tourisme Dario Franceschini, a pris un nouveau tournant cet été avec deux annonces-phares du ministre : pour l’investissement, une somme de 80 millions d’euros sera affectée à la restauration du patrimoine, dont 18 millions pour le Colisée de Rome, monument le plus visité d’Italie. Le Colisée devrait retrouver son sol d’origine, en plancher et sable, où les romains organisaient les Jeux et leurs combats.
Ensuite la réforme des musées a commencé par la nomination de 20 nouveaux directeurs qui prendront leurs fonctions cet automne. Ces nouveaux directeurs ont été « choisis sur leurs CV pour apporter innovation et modernisation » aux musées italiens. Parmi eux,une moitié de professionnels étrangers ou d’Italiens de retour de pays étrangers a créé la polémique (Et nous ? ont demandé les conservateurs italiens). D’autant que certains ne sont « même pas » conservateurs, ont fait remarquer les plus corporatistes.
Ce grand chantier des musées, annoncé dès le début de l’année – cf notre billet « Italie, une révolution culturelle »  – vise à placer les 4588 musées, aires archéologiques et monuments historiques ouverts à la visite au niveau de la meilleure muséologie internationale. Stratégies, financement, gestion, accueil des visiteurs : l’ICOM, International Council of Museums, sera sollicité et organisera d’ailleurs sa prochaine Conférence Générale à Milano, en juillet prochain.
ColiséeI- LE COLISÉE DE ROME, déjà restauré par le mécène Diego Della Valle, qui y investit 25 millions (2013-2016), va bénéficier de 18,5 millions pour la rénovation du sol de l’arène (3.357 m2), ce qui permettra aussi de restaurer et réaménager les sous-sols pour que les visiteurs comprennent plus facilement le fonctionnement du lieu à l’époque romaine, et peut-être d’y créer un nouveau musée sur l’histoire du site. Rappelons que le Colisée est le plus grand amphithéâtre romain au monde, avec son ellipse au périmètre de 527m capable d’accueillir plus de 70 000 spectateurs pour vivre les « Jeux », sports et  combats. Les combats  eurent lieu jusqu’au milieu du VIéme siècle sous leurs trois formats : entre les animaux (Venationes), entre condamnés à mort et animaux (Noxii) ou entre les  gladiateurs entre eux( Munera). L’ensemble des spectacles faisaient le bonheur des romains, « Panem and Circenses », du Pain et des jeux !
L’an dernier le circuit « Colisée, Forum et Palatino » a reçu 6.265 669 visiteurs, d’après le ministère des Biens culturels.
Il n’est pas annoncé à ce jour de programme précis mais  le Colisée se dotera d’une structure et des compétences pour l’organisation de « Spectacles », comme celle de Versailles  qui gère toutes les activités et spectacles du  Domaine, ou celles de Cultures Espaces qui gère les spectacles dans les arènes de Nîmes. Pour l’instant, le ministre a seulement annoncé que les visiteurs touristiques pourraient enfin visiter les sous-sols pour mieux  comprendre le fonctionnement du Colisée antique; et que des spectacles de haut niveau y seraient organisés ( « et non pas des concerts de rock ou des parties de foot, comme se plaisent à le dire certains.. », a-t-il précisé dans le 19 août dernier (El Pais).

 

 

pinacothquedebreraentreeII- LE FONCTIONNEMENT DES MUSÉES
Dario Franceschini disait aussi à El Pais en août dernier:  « Nous n’avons pas un grand musée national, comme vous avez le Prado, mais 4000 musées importants. Le plus grand, celui des Offices de Florence, est douze fois plus petit que Le Louvre ! ».Avec ces réformes, la fréquentation devrait considérablement augmenter- actuellement de 40 millions de visiteurs chaque année, dont 2 millions de visiteurs pour les Offices de Florence – car de très grandes collections, faute d’une bonne organisation, ont une très faible fréquentation.
– Les préconisations du ministre sont classiques, celles qui existent dans les grands musées français, anglais ou américains : plus d’autonomie, une vraie comptabilité, des réseaux régionaux, une direction, l’entrée dans le monde numérique.

Voilà ce que vont connaître chacun des 400 musées des régions et les 20 musées d’Etat, qui n’avaient donc rien de tout cela. Aux vingt nouveaux directeurs s’ajouteront des fonctionnaires de la MIBACT (le ministère) pour organiser la mise en place des nouvelles orientations qui devraient essaimer sur l’ensemble des musées et sites historiques (5000 environ). Les Services font évidemment partie des nouvelles priorités pour le confort des visiteurs. Aux fonctions traditionnelles (Conservation/restauration/recherche) s’ajouteront des compétences « Publics, Mécénat et Marketing » ainsi que celle de la « Sécurité ». Enfin le ministre annonce aussi une réforme des politiques horaires et tarifaires afin d’ouvrir davantage les musées aux visiteurs et aux habitants de proximité. Voici la liste des vingt premiers musées concernés :
1) Galleria Borghese (Roma)
2) Gallerie degli Uffizi (Firenze)
3) Galleria dell’Accademia (Firenze)
4) Galleria Estense (Modena)
5) Galleria Nazionale delle Marche (Urbino)
6) Galleria Nazionale dell’Umbria (Perugia)
7) Galleria Nazionale d’Arte Moderna e Contemporanea (Roma)
8) Gallerie dell’Accademia (Venezia)
9) Gallerie Nazionali d’arte antica (Roma)
10) Museo Archeologico Nazionale (Napoli)
11) Museo Archeologico Nazionale (Reggio Calabria)
12) Museo Archeologico Nazionale (Taranto)
13) Museo Nazionale del Bargello (Firenze)
14) Museo di Capodimonte (Napoli)
15) Palazzo Ducale (Mantova)
16) Palazzo Reale (Genova)
17) Parco archeologico di Paestum (Paestum)
18) Pinacoteca di Brera (Milano)
19) Polo Reale (Torino)
20) Reggia di Caserta (Caserta)

 

 

Nuovi Uffizi - Première RennaisanceIII- LES 20 DIRECTEURS ET LEUR RECRUTEMENT :14 historiens de l’art, 4 archéologues, 1 gestionnaire culturel et 1 spécialiste en muséologie ont été choisis parmi les 1222 candidats, après une annonce du ministère postée sur « The Economist ». Ils prendront leurs fonctions entre Septembre et Novembre, a annoncé le ministère, qui avait choisi les critères suivants:
– Proposer des « programmes culturels innovants pour être en phase avec les visiteurs locaux et internationaux ».
– Imaginer des solutions des modèles de financements alternatifs et complémentaires des financements actuels). http://jobs.economist.com/job/8738/directors-of-italian-museums/
– Avoir une expérience de gestion d’au moins cinq ans avec une spécialisation culturelle ou scientifique
– Et une forte expérience internationale
Les nouveaux directeurs : 80 candidats étrangers ont candidaté, et sept des futurs directeurs choisis sont européens – trois allemands ; deux autrichiens, un français, un anglo-canadien et quatre italiens qui occupaient un poste à l’étranger
« Ils ont été choisis sur la base de leur expérience et de leur CV; naturellement, ils ont besoin de comprendre l’art italien et de parler l’italien, mais ils doivent surtout être prêts a relever « grand défi » « , a ajouté le ministre, « celui de redonner aux musées italiens la place de leaders qu’ils occupaient autrefois dans le monde ».
Démission aux OfficesIV- L’ACCUEIL DES RÉFORMES : La Presse a largement relayé la polémique de conservateurs irrités par l’arrivée d’étrangers à la tête des musées italiens pour en diriger les 20 sites majeurs, La Stampa du 19 août a demandé son avis aux lecteurs, avec un petit sondage-flash, « Cliquez oui ou non ! » qui donne tout de même une meilleure image de l’accueil des directeurs choisis.

La Question : Sept (sur 20) des nouveaux directeurs des prinicpaux musées italiens sont des  étrangers. Etes-vous favorables à leur nomination?Les pourcentages ont été réaqlisés avec les 5600 votes des lecteus de la stampa en ligne : 87% despersonnes sont favorables, 13% ne le sont pas. Ci-contre, démission d’une conservatrice de la Galerie des Offices, après une conférence de presse houleuse. (La photo vient du site Internet des Offices).

Sondage aout 2015 La Stampa (2)

 

 

 

 

 

 

 

 

Le regret des conservateurs est, au fond, que tous les futurs directeurs ne sont pas tous des historiens d’art et des conservateurs attitrés. Et puis, pour la première fois, les conservateurs ne seront plus « maitres des lieux » puisqu’un un directeur ou une directrice décidera « à leur ancienne place » de la vie et de l’avenir du musée. La peur vient surtout de cette nouvelle organisation, de son horizontalité, avec des missions de même valeur, sans hiérarchie affirmée (Conservation/Marketing/Mécénat/Sécurité…). Bref, cette perte du rôle « dominant » nous rappelle ce qui est arrivé en France lors de la création du Musée d’Orsay, puis lors de la Création du Grand Louvre ou de la réforme du fonctionnement du Château de Versailles. L’arrivée de nouvelles compétences (management ; marketing et numérique) est toujours assez mal vécue dans un premier temps, puis ces résistances au changement diminuent et disparaissent…Jusqu’à la prochaine réforme 🙂
ICOM (2)V- MILAN 2016 !
L’ICOM, International Council of Museum, tiendra sa grande Conférence générale à Milan en 2016du 3 au 9 juillet, sur un thème vraiment neuf : « Le Rapport entre les musées et le paysage culturel ».
LE MUSEE DIFFUS : IL MUSEO DIFFUSO !
Le thème propose que tout musée puisse s’affranchir de ses limites physiques et jouer un rôle au niveau de l’ensemble du territoire où il est implanté. L’objectif serait d’élargir son action et ses responsabilités à l’ensemble du patrimoine culturel de ce territoire.
Avec une question : de quelles manière, avec quels moyens, en s’appuyant sur quelles initiatives et propositions, les musées peuvent-ils contribuer à diffuser la connaissance du patrimoine culturel présent dans et hors de leurs murs ?
« Nous pensons que les musées doivent se sentir responsables de leurs collections, mais aussi du patrimoine qui les entoure ! », dit la première Brochure de la Conférence de Juillet.
Si les musées veulent jouer ce rôle de tutelles actives et de conseil auprès des plus petits sites patrimoniaux, grâce à leurs compétences, la fameuse « inscription territoriale » prendrait une fière allure : ingénierie et développement. Pourquoi pas ?
Adresse pour suivre l’ actualité de cette conférence sur Facebook et y voir la première vidéo de communication pour cette conférence.

280px-IMG_0386_-_Galleria_nazionale_d'arte_moderna,_frontEN CONCLUSION, ces nouvelles réformes et ces investissements sont sans doute nécessaires ; il faut espérer que la réforme sera rapide pour que les musées italiens deviennent plus innovants et que leurs collections, parmi les plus belles du monde, soient réellement visitables avec plaisir. Et que l’ensemble des équipes y participeront, car un musée reflète toujours la bonne entente de ses personnels. En quoi une gestion plus précise, une forte internationalisation, une muséographie innovante et la participation à la révolution numérique nuiraient –elles à la conservation des œuvres ?
Je ne vois pas très bien.
Et vous, chères lectrices et chers lecteurs, quelles réformes feriez-vous pour réformer la culture (musées, monuments, événements, …) en France?
006-accademia_florencePOUR EN SAVOIR PLUS
– La page officielle du ministre Dario Franceschini sur Facebook,
– La Stampa La riforma Franceschini rivoluzionerà tutti i 400 musei italiani 
– La Stampa 20.08.2015 Ecco tutti gli ostacoli per i nuovi direttori dei musei : Dovranno combattere contro burocrazia, scarsa organizzazione, veti sindacali 
– La Stampa du 19 août 2015 : Stranieri alla guida dei nostri musei: non è uno scandalo, metodo giusto 
– La Stampa : Ecco cosa ci possono insegnare i direttori stranieri nei nostri musei (Voici ce que les directeurs étrangers peuvent apprendre à nos musées peuvent apprendre à nos musées les directeurs étrangers). Un article très intéressant, qui reprend en les développant 4 thèmes : Le visiteur au centre ; le courage de changer ; le pragmatisme ; de fortes ambitions) @massimo_russo
-La Stampa : la Carte, de Paris à New-York, des italiens importants dans l’art et les musées 
– L’article du new York Times du 18 aout2015, d’ ELISABETTA POVOLEDO: Un historien de l’art allemand dirigera les Offices, à Rome «German Art Historian to Direct Uffizi Gallery in Italy »
– L’article d’El Pais : Los nuevos directores extranjeros de museos dividen a Italia (Les nouveaux directeurs de musées étrangers divisent l’Italie)
– The Guardian du 18 août sur le choix des directeurs étrangers  :
– The Guardian du 23 août 2015 : Could a German spark a renaissance in the revered temple of Italian art?

NOS PHOTOS : Galleria Uffizi à Florence (Leonard-de-Vinci, La Battaglia-di-Anghiari – copie TavolaDoria)
; Colisée de Rome;  Pinacothèque de Brera; Nouvelles petites salles de la Galerie des Offices de Florence pour la première Renaissance italienne.Galeria nationale d’arte moderna de Roma;Accademia de Florence;

 

 

PAVILLON COREE DU SUDKEN LE TOURISTE PARFAIT Ken, pour UNE fois, hésitait…Rome? Naples?Florence? Venise ou la si jolie Perugia? En fait il avait l’embarras du choix. Avant de donner sa réponse à Dario, il appela donc, entre deux réunions d’affaires et dans son jet privé, son ex, Barbie Chérie. Après tout c’est elle qui ferait le « gros effort », comme elle disait, de quitter L.A pour devenir la meilleure des épouses d’un directeur de musée italien. C’était donc à elle de décider!

Nantes, une belle histoire pour l’avenir!

CouverturePour votre rentrée, quoi de mieux pour vous donner de l’énergie que la belle histoire de Nantes, devenue la meilleure ville du tourisme culturel?
Aujourd’hui je résumerai pour vous un excellent petit livre sur la transformation de la ville depuis les années 80, qui  nous raconte, étape par étape, les démarches et l’énergie déployées par les élus, les professionnels et les artistes. Comment fut possible la réussite de Nantes? Quels sont les secrets de cette réussite? Quel fut le jeu des acteurs, la réception des nantais? Et demain?
« Réenchanteur de ville, Jean Blaise » , écrit par le journaliste Philippe Dossal , retrace l’aventure et les choix d’une ville et de ses voisines. Le choix d’une culture ouverte, qui s’adresse aux habitants comme aux visiteurs touristiques et n’a pas besoin de monuments ou de médiateurs pour être comprise et aimée par tous.Une histoire incroyable!

I- 30 ANS DE COLLABORATION entre élus, artistes et Services de la Ville, entreprises, commerçants, industriels, maraîchers, ouvriers et étudiants, c’est tout de même assez rare! Voici les différentes étapes de ce long parcours, qui fait venir aujourd’hui des millions de visiteurs « pour voir et vivre » la culture dans la ville ou sur la Loire :
– Nantes avant cette histoire, dans les années 70, est une ville qui a beaucoup perdu : la construction navale est à l’agonie et les industries agro-alimentaires ont été rachetées par des groupes internationaux et une partie de la jeunesse est en exil sur un lointain campus.
– 1982 : Jean Blaise est recruté par la ville pour préfigurer une nouvelle « Maison de la Culture », avec un un projet qu’il ne changera jamais, au fond : s’ appuyer sur les forces vives de la ville, faire connaître la culture venue d’ailleurs, décloisonner les petites boites où s’enferment les disciplines ( art contemporain ou cirque, théâtre ou danse, arts de la rue, musique classique ou musiques dites populaires).

– « Aujourd’hui réapparait cette idée de la nécessité des échanges, des contacts, des mélanges. L’on parle de convivialité, d’interdisciplinarité, de stimulation. Il ne s’agit ni plus ni moins que de créer des courants novateurs par le métissage » », écrit Jean Blaise en 1983.Il part donc à la rencontre du public, mais pas dans la Maison de la Culture, plutôt dans les rues de la ville, dont il aime les profondeurs, la poésie, les habitants.
affiche2012 1983 : fédération d’un réseau d’élus de villes périphériques avec la banlieue de Nantes, Rezé et Saint-Nazaire, La Roche-sur-Yon, qui poursuivent l’aventure grâce à la volonté de leurs élus (Joël Batteux, Jacques Auxiette, Jacques Floch…) sur des projets culturels puis création du CRDC, centre de développement pour le développement culturel avec une mini-équipe de 6 personnes. Première intervention de Royal de Luxe, avec La demi-finale de Waterclash à Saint-Nazaire, intervention complètement surréaliste et qui sidéra des spectateurs conquis par une longue parade/spectacle restée dans toutes les mémoires. Du « jamais –vu », car jamais il ne faut faire la même chose, autre secret de fabrication. Ne pas se répéter deviendra un light motive, pour ouvrir d’autres horizons, apporter des vents nouveaux au souffle des villes, de leurs périphéries  ou des campagnes.
– 1990-1996 Les Allumées sont un projet très clair : « Pendant six ans, les artistes de six villes étrangères apporteront leur contribution à la Ville de Nantes de six heures du soir à six heures du matin! » Nouveau format, encore, et qui donnera le meilleur :
– Barcelone avec les artistes de La Fura dels Baus et ceux de Carles Santos, dans toute la ville, avec une prédilection pour ses friches, coins abandonnés et chargés du passé, lieux périphériques que l’on atteint en bus à trois heures du matin ; ou encore des lieux à l’envers, comme un cinéma « sleep » avec des lits à la place de fauteuils. Dérision, humour, ambiance bon enfant : des milliers de visiteurs et tout le monde se parle…
 Léningrad/Saint Pétersbourg, l’année suivante, avec 300 artistes venus en cargo et éparpillés dans la ville ; Buenos Aires et la « psychanalyse » de 356 personnes allongées qui précisaient leurs ‘images de la ville de Nantes » ; enfin Naples et ses cours de cuisine avec mandolines sous les balcons puis les 300 artistes du Caire qui firent danser les jeunes des cités périphériques. La dernière invitation à Havane, hélas, fut annulée par le refus de Cuba de laisser partir les 320 artistes choisis, et remplacée par une semaine de débats intenses à Nantes.
– 1995-2000  Lieu Unique, l’ancienne usine LU, est tout d’abord réhabilitée avec le concours de l’équipe du CRDC (Patrick Bouchain, Architecte) qui travaille déjà dans les lieux,  pour accueillir tout à la fois un bar, un restaurant, une librairie, une crèche, un espace d’exposition, une salle de spectacle, des bureaux et un hammam. Lieu Unique est ouvert de 11h à 2 heures du matin et lancera la mode de lieux alternatifs  « à peine retouchés », où les marques du temps sur les murs, la toiture et les différentes fonctions des espaces doivent être conservés donc savamment grattés, assainis et restaurés plutôt que « relookés » avec minimalisme. Pas de mobilier high tech, non plus, pour éviter l’aseptisation et la monotonie  qui gagne les sites culturels et font qu’ils finissent par tous se ressembler..
image_fichier_fr_190810_jdo_10– D’autres formes sont expérimentées, dont La Folle Journée de Nantes,  organisée par  René Martin, qui est la plus connue : elle a entièrement revisité les codes et la  présentation des concerts de la musique classique. Citons d’autres exemples de « nouveaux formats », comme en 1996 : Trafics  et les Quarts d’heure ; ou Cuisine et performances  en 1997 ; Fin de Siècle avec Johannesburg invitée, puis  New –York. La Nuit Unique proposa, en 2003 une question aux nantais qui veulent venir en débattre en s’adressant à eux : « Quelle  place tient l’art dans la vie de chacun ? Environ 15% de la population fréquente régulièrement les lieux dédiés aux arts et à la culture. Pourquoi les 85% restants ne le font-ils pas ? Venez en discuter à l’occasion d’un grand dîner », lequel comportait 1000 places. Même appel à tous les nantais pour le Grenier du siècle, où 11 855 objets choisis par les habitants comme représentatifs de leurs vies et du monde sont mises en boites ou en bidons, qui seront scellés et ne seront ouverts qu’en que le 1er janvier 2100.
– Enfin la demande est toujours très forte à l’étranger et à Paris pour inviter les organisateurs et artistes de ces manifestations culturelles, et Jean Blaise conseillera le maire de Paris pour y créer la Nuit Blanche.

 

II- ESTUAIRE est aussi une très belle aventure car les artistes ont travaillé  sur 40 kilomètres, entre Nantes et Saint-Nazaire. Nous avons déjà souvent évoqué ce petit chef d’oeuvre d’organisation dans ce blog, et sa longue préparation auprès des communes, associations, entreprises ou institutions proches de l’estuaire de la Loire, plusieurs années avant la programmation de l’opération. Alors rappelons seulement que c’est le contraire de ce que l’on voit généralement ailleurs, le contraire de ces parcours urbains ou ruraux parsemés d’œuvres d’art placées un peu au hasard, choisies on ne sait comment ni par qui ni sur quels critères, l’essentiel étant qu’elles égayent la visite d’un site naturel ou la randonnée sportive.
van_evt_2015– Pour donner du sens à Estuaire, un nouveau défi, politique, attend des réponses culturelles: comment redonner du sens à la Loire entre les deux villes, si différentes ?  Comment reconquérir l’espace abandonné ? Faire lien avec les futurs projets d’aménagement urbain ou rural ? Les élus de la région, les aménageurs qui avaient vu cet estuaire se dégrader peu à peu, avec des navires de gros tonnage, des berges inaccessibles, une nature négligée – malgré sa très grande beauté- et inconnue du million d’habitants tout proches.
Les équipes pour concevoir cette mise en valeur de la Loire se forment, avec une temporalité : il y aura 3 éditions d’une Biennale d’art, pendant  6 ans . Et leurs méthodes habituelles de concertation pour, comme avait dit Jean Blaise , «  choisir les meilleurs artistes » ( Jean de Loisy fut l’organisateur de la programmation)et que, peu à peu, chaque lieu « invente sa propre vie ».Pour chaque installation, l’artiste devait entre en correspondre plus ou moins au projet d’ensemble, celui de redécouvrir un morceau de la Loire, un port ou un site naturel magnifique mais inaccessible ou carrément abandonné. Les riverains du lieu ont été sollicités non pas sur ce qu’ils voulaient ( artistes, types d’œuvres…) mais sur ce qu’ils pensaient par exemple de leur passé dans ce lieu, sur leurs habitudes, leurs façons de le vivre, ou non, leurs espoirs pour le futur.
Etablir des correspondances, étonner, amuser et provoquer des questions   : tout le parcours est une succession d’imaginaires (Celui des artistes) et de surprises (pour le visiteur).Les élus des toutes petites communes, les associations de protection de l’environnement, le Conservatoire du Littoral, le Port autonome et les riverains ont coproduit Estuaire avec  les organisateurs (Jean Blaise, Daniel Sourt, Jean-Luc Courcoult mais aussi Laurent Théry, géographe et urbaniste et la SAMOA, société d’économie mixte qui gère l’urbanisation de l’Ile de Nantes)pour régler le questions de l’occupation du domaine public ou du  montage des œuvres. Laurent Théry, en charge de l’aménagement de l’Ile de Nantes avec le paysagiste Alexandre Chemetoff verra donc la manifestation Estuaire intégrer la pointe de l’Ile dans sa première édition.  Voir les œuvres et les artistes, ICI
Le bilan est très positif, avec un public ravi. Un public très important dès la première année avec des  centaines de milliers de visiteurs et un grand brassage social qui mélange amateurs d’art ou de nature, randonneurs ou touristes étrangers d’un jour, groupe de croisiéristes ou de cyclistes. Ce succès public était inattendu, alors que, pourtant, l’association de plusieurs centaines d’habitants/entreprises locales, grosses ou petites, artistes et élus qui avaient participé à la gestation du projet, représentait à lui-seul autant d’ambassadeurs très impliqués !
appli_vanIII- FUSION TOURISME ET CULTURE, une décision politique
La communauté urbaine de Nantes devenue Nantes-Métropole devait rationnaliser son organisation, regrouper les offices de tourisme de l’agglomération, par exemple, et le maire de Nantes-Métropole, Jean-Marc Ayrault ainsi que Benoist Pavageau, le Directeur général de Nantes Métropole, proposèrent en 2011 la « création d’une structure regroupant Nantes Tourisme, Nantes Culture, Patrimoine et Estuaire dans une structure unique » qui fusionnerait aussi ses atouts et mutualiserait ses moyens, explique Astrid Gingembre dans l’ouvrage (p.108). Evidemment cela ne se fit pas sans difficultés, car «faire cohabiter culture et tourisme dans une même entité apparaissait être à certains une sorte de dévoiement de la culture »(p.109).Jean Blaise fut donc sollicité, quitta la direction de Lieu unique avec ses trente cinq personnes pour la nouvelle entité qui regroupait deux cents employés et de nombreux métiers.
IV- LE VOYAGE A NANTES, nom de la nouvelle structure, était né, avec un vrai nouveau projet , « La ville renversée par l’art », qui est en quelque sorte  l’aboutissement des séquences précédentes avec un vrai parcours artistique nantais( que nous avons présenté dans ce blog) et un projet pour l’avenir du réaménagement de l’Ile de Nantes avec ses nouveaux partenaires : les urbanistes, les architectes, , les paysagistes, les artistes, mobilisés ensemble.
Philippe Dossal termine son livre en observant la « contamination » de tous les acteurs par le virus de l’art : les commerçants, les entreprises, nous l’avons vu, mais aussi le Service des espaces vert devenu force de proposition. Ce Seve qui « installe des jardins potagers dans les parterres du centre-ville, installe des tables de pique-nique pour que les promeneurs y dégustent des fruits, cueillent des légumes ou des herbes aromatiques » ! Contamination des idées et des imaginaires entre ce Service et ses partenaires de Lieu Unique ou avec  Pierre Orefice et François Delarozière (Les Machines de l’Ile) depuis les années 2000, mais aussi contamination grâce au « travail  ensemble » pour le vaisseau spatial végétal, l’Aéroflorale » ,ou pour les Jardins flottants, la grande Cantine en forme de serre  ou « Le Jardin étoilé » de l’artiste Kinya Maruyama.  « Notre collaboration avec les doux dingues du monde de la culture s’est inventée progressivement. On se fertilise les uns les autres », confirme Jacques Soignon, directeur du Seve, qui a même créé un bureau d’étude, au sein du Seve, avec une équipe de paysagistes dédiée aux événements » qui sont les nouveaux interlocuteurs dédiés aux projets de  Jean Blaise et de ses équipes. Et deux millions de visiteurs sont venus visiter le jardin des Plantes confié par J.Soignon à l’écrivain Claude Ponti pour le « revisiter ».Le magnifique poussin géant endormi sur la pelouse, ci-dessous,  est tout à fait dans la ligne « poésie, humour, tendresse » des équipes aujourd’hui en « fusion » !
jardin-dejante-claude-ponti-3192797_6CONCLUSION  : cet automne sortira le Rapport confié à Jean Blaise par le ministère de la Culture sur l’art et la culture dans l’espace public. « Le constat est assez préoccupant, dit Jean Blaise. Les institutions culturelles se sont refermées sur elles-mêmes et touchent au mieux 10% de la population»  (p.120) Souhaitons que la contamination se poursuive et que notre pays tout entier puisse attraper le virus de l’art ! Cela éviterait aussi les tendances du tourisme français à n’utiliser, pour faire des progrès,  que les seuls atouts d’une triste banalité car tous les autres pays concurrents de la France les ont aussi, et déjà (Espagne, Royaume-Uni, Australie, Italie, Etats-Unis, Allemagne, etc…) Ces atouts sont à peu près toujours les mêmes, depuis des années. Il faut soutenir et développer, dit le dernier Rapport, les secteurs suivants « Gastronomie, œnologie, promo du pays sur un site web  unique, Numérique,  Marketing des destinations ou des marques, Formations ……». (On notera au passage  que le Golf et les Spa, multipliés il y a cinq/dix ans, ont tout de même disparu des priorités cette année….) Mais ces atouts classiques suffisent-ils à maintenir notre fréquentation et à l’améliorer ? Notre avis est que tout cela est essentiel, basique « (Bien boire/manger/dormir« ),  mais ne fait pas levier pour différencier notre offre de celle de nos concurrents, qui  sont déjà, pour la plupart,  au sommet dans ces domaines! Si la Culture et notre art de vivre sont toujours l’attrait numéro un de notre pays, pour les étrangers, et si plus d’un visiteur sur deux dans nos musées est un touriste, pourquoi ne jamais  parler de l’innovation culturelle? Si Lyon, Lille ou Nantes sont autant visitées par des délégations chinoises très curieuses, qui veulent s’inspirer de nos meilleurs modèles du tourisme culturel aujourd’hui, c’est sans doute parce qu’ils ont de l’avenir.
Enfin nous vous tiendrons au courant de la fréquentation de Nantes cet été car, comme chaque année, Jean Blaise présentera à l’automne le bilan de la fréquentation du Voyage à Nantes  et celui des retombées économiques. Il répètera sans doute, comme chaque année aussi, que la fréquentation est en hausse et que l’argent public investi a fait de la Ville, qui n’était pas très culturelle, une destination de choix, à la fois haut de gamme et populaire, pour le tourisme urbain et que de très nombreux jeunes souhaitent, après avoir choisi Nantes pour leurs études, s’y installer!

POUR EN SAVOIR PLUS : l’ouvrage REENCHANTEUR DE VILLE, JEAN BLAISE, par Philippe Dossal – Editions HD, Ateliers Henry Dougier, avril 2015, 128 pages.,  ( http://www.ateliershenrydougier.com), une collection qui raconte la démarche singulière d’individus ou d’équipages engagés dans des expériences originales qui renouvellent ou réinventent la société.Diffusion Seuil/Volumen. Et pour le Voyage à Nantes, c’est ICI!

– Ci- dessous, une vidéo du  retour de Long Ma le cheval-dragon, parti en Chine ! Chaque jour, Long Ma se déplaça librement sur la pointe ouest de l’Île à l’occasion du Voyage à Nantes et durant 10 jours, du 14 au 23 août.  Pour le retrouver il fallait partir à sa recherche : le découvrir endormi, au galop, crachant du feu ou mangeant à la cime d’un arbre selon ses envies..

Photos : site de Nantes-Tourisme, et Le Grand Éléphant © Jean-Dominique Billaud

Les horaires de ses apparitions seront donnés au jour le jour sur www.levoyageanantes.fr

 

nantes-digital-week-3778336_19The Jazz LifeKEN LE TOURISTE PARFAIT était, lui, totalement désenchanté! Impossible depuis un mois   de dépenser tous ses milliards tellement il voyageait, en bon touriste d’affaires, consommant chaque semaine plusieurs palaces, une dizaine de jets privés ou quelques voitures avec chauffeur…Il arriva à Londres et fila joyeusement pour piller tous les magasins de luxe, histoire de laisser lors de son bref passage un maximum de retombées économiques. Il faut dire que sa chance, pour cette activité, c’était son ex, Barbie chérie, qui, heureusement pour lui,  a-do-rait les cadeaux de la Vieille Europe, comme elle disait! Il lui avait donné rendez-vous à la Digital Week de Nantes, mi septembre!

Démocratie participative, tourisme et culture

J aiune idee pour le Grand ParisFaire participer les usagers, demander des avis, réaliser des projets qui engagent les citoyens, est-ce possible pour une ville?Une région? Un département? Un musée? Un monument?
Ces expressions, que l’on peut résumer par la « Démocratie participative » , sont souvent des mots vides, « à la mode », voire des arguments-alibis qui ne recouvrent aucune réalité. Les outils du numériques sont aussi trop souvent partie prenante de cet effet de mode : on pense « outil » avant de penser « usage et pratiques, » et hop! Le tour est joué : mettre une application pour guider les visiteurs suffirait à moderniser son image et à démocratiser  les pratiques et les usages des visiteurs.
Alors, lorsque nous avons découvert la proposition de la Maire de Paris de réserver réellement une partie du budget à des propositions exprimées par les parisiens eux-mêmes, cela nous a fait plaisir.
Comme le sujet est politique, et que les élections régionales approchent, ce qui nous étonne est que si peu de programmes politiques ou si peu  d’acteurs culturels ou touristiques s’en saisissent, dans la presse ou « sur le fond ».
– Pourtant, voici une démarche qui, si elle n’est pas vraiment nouvelle (Voir notre Historique rapide ci-dessous, tout a commencé en 1989 au Brésil…), est réellement très intéressante .Car pour ces expériences de budgets participatifs, les villes et régions partent des principes suivants:
– que les élections municipales, tous les six ans, ne suffisent pas à répondre aux demandes des habitants et que reprendre l’avis des citoyens, puisque c’est possible via les conversations numériques, est beaucoup mieux;
– que les techniciens/Administratifs d’une ville ne peuvent pas suivre au jour le jour l’évolution des demandes, les nouveaux projets, l’air du temps; ils ont donc, c’est vrai, une sorte de « clientèle attitré »e aux projets et aux subventions. Cet appel d’air « participatif », même modeste, car il ne concerne que 5% du budget d’investissement, 75 millions d’euros cette année, tout de même! – peut donc contribuer à mieux refléter les compétences et les désirs des habitants.
– que ce type d’appel à projets venant de la population nécessite une nouvelle façon de les évaluer, d’établir des critères de leur éligibilité, et met à mal les petites cases des subventions. Il vous est sans doute arrivé de ne pas pouvoir « rentrer » dans ces petites cases, votre projet étant pluridisciplinaire ou hors normes.

Redonner, grâce au partage d’un budget, un peu d’initiative aux habitants, est-ce déraisonnable? Voyons tout d’abord comment cela fonctionne (à paris), puis nous ferons des propositions pour les filières du Tourisme et de la Culture.

I- MODE D’EMPLOI DU BUDGET PARTICIPATIF
Le Budget 2015 : précisons que cette année l’enveloppe dédiée au budget participatif s’élève donc à 75 millions d’euros d’investissement, répartie de la façon suivante : 37,3 millions d’euros pour l’échelon parisien, 37,7 millions d’euros pour les budgets participatifs d’arrondissement (dont la moitié correspond à l’abondement par la Maire de Paris). Au terme de la mandature,en 2020, ce budget participatif représentera presque un demi-milliard d’euros (426 millions d’euros) qui auront permis aux les Parisiennes et les Parisiens de se prononcer directement sur l’affectation de 5% du budget d’investissement de la Ville. Et un meilleur mode de vie, faut-il le préciser!

1- QUI PEUT PARTICIPER ? seuls les parisiens, mais tous les parisiens, sans condition d’âge ou de nationalité, peuvent proposer des projets. Et seul l’investissement est concerné, et le projet ne devant pas générer de dépense de fonctionnement direct. Les propositions peuvent concerner un seul ou plusieurs arrondissements ou même tout Paris!
3.COMMENT PARTICIPER ?
Pour proposer un projet, il suffit de s’inscrire en ligne sur la plateforme idee.paris.fr. Après, on peut le déposer sur cette plateforme, ou l’enrichir ou le faire soutenir par d’autres internautes.
Des réunions de co-construction de projets ont lieu dans des lieux partenaires pendant toute la phase de dépôt des projets, et l’agenda de ces réunion est aussi en ligne sur le site idee.paris.fr. Comme en 2014, la Ville de Paris n’a pas souhaité restreindre la créativité et l’inventivité de ses habitants: tous les projets seront reçus et étudiés. Une réponse a été apportée à chaque proposition postée sur la plateforme avant juin 2015.

4. COMMENT LES PROJETS SONT-ILS SÉLECTIONNÉS ? 
Les services de la Ville analyseront la recevabilité des projets qui doivent relever :
– de l’intérêt général ;
– de la compétence de la Ville de Paris ;
– du budget d’investissement (aménagement de l’espace public ou d’un équipement, achat de fournitures pour les écoles, musées ou bibliothèques) et non du budget de fonctionnement (dépenses et recettes nécessaires à la gestion courante de la ville : rémunération des personnels, achats des services, subventions aux associations, etc.).

5. LE CALENDRIER
– Du 14 janvier au 15 mars : dépôt des projets sur idee.paris
– Jusqu’à fin mai : analyse des projets par les services de la Ville
– En juin : annonce des projets parisiens soumis au vote lors d’une agora citoyenne
– Du 10 au 20 septembre 2015 : vote du budget participatif par les Parisiens sur budget participatif.paris.fr ou sur bulletin papier. Si on peut proposer des projets pour tout paris, on ne peut voter que dans un seul arrondissement, celui où l’on habite ou celui où l’on travaille.

6. L’INFORMATION
La réalisation des projets retenus fait l’objet d’une information régulière diffusée sur budget participatif.paris.fr. Les personnes qui ont expressément choisi de s’abonner à l’alerte « Budget Participatif » sont informées par courriel de l’avancée des projets et des prochaines étapes du budget participatif.

Mode d emploi

On peut d’ailleurs télécharger le budget participatif mode d’emploi ainsi que la Charte du budget participatif 2015. Notons aussi que la Charte n’est pas gravée dans le marbre et peut être révisée, notamment sur la base des bilans effectués à l’issue des campagnes annuelles du budget participatif, en concertation avec le Comité des arrondissements et après consultation de la Commission Parisienne du Débat Public.
On le voit : en plus de proposer un projet, le citoyen est sensibilisé au fonctionnement d’une ville, à sa « mécanique budgétaire », peut mieux s’approprier la ville et mieux évaluer, par la suite, ses progrès ou de ses échecs. Ce rôle « pédagogique » des budgets participatifs est important.

II- LES PROJETS 2015
Voici, pour 2015, le nombre de projets reçus et classés par grands thémes :
Cadre de vie (22)
– Culture et patrimoine (10)
– Economie et emploi (5)
– Education et jeunesse (6)
Nature en ville (9)
– Propreté (5)
– Solidarité (1)
– Sport (3)
– Transport et mobilité (5)
– Ville intelligente et numérique (5)
– Vivre ensemble (6)
Culture, patrimoine, tourisme et numérique sont majoritaires dans les nombreux propositions, croisant les différentes thématiques, comme :
des billetteries intelligentes, « ( Plateformes en ligne, applications dédiées, bornes interactives sont autant de moyens qui permettent de partager ce patrimoine en perpétuelle réinvention.),
– le musée Carnavalet, musée d’histoire de Paris, et ses fabuleuses collections (plus de 650 000 œuvres et objets !).
donner une seconde vie aux cadenas d’amour du Pont des Arts, supprimés à cause de leur poids en 2014 .
– développement des pistes cyclables et du covoiturage ou celui de multiplier les sanisettes; celui d’installer des assises confortables (bancs, chaises, …) permettant de se (re)poser, de dialoguer, de bouquiner, de méditer, de contempler, ainsi que des tables pour pique-niquer ou jouer….
– mieux distribuer l’espace public en faveur des piétons et de mettre en place des axes agréables et sécurisés, pour les déplacements quotidiens et/ou la promenade; l’aménagement des des berges de la Seine;
– une promenade le long du Canal Saint Martin, etc….
Vous pouvez lire tout le descriptif et le financement demandé pour chaque projet en 2015-2016 ici 

Merci aux parisiensBREF HISTORIQUE DES BUDGETS PARTICIPATIFS en France et dans le monde
1989 – 1997 : de l’expérience de Porto Alegre au Brésil et de Montevideo en Uruguay (30 expériences)
1997 – 2000 : expansion brésilienne (140 villes avec des différences)
2000 – 2007 : expansion dans le monde avec le succès des Forums Sociaux Mondiaux (Amérique Latine, Europe)
2004-2011 : France : La ville de Grigny (Rhône) avait mis en place un budget participatif. Jusqu’à environ 25 % de son budget d’investissement a été géré de manière participative.
2005 : La Région Poitou-Charentes a mis en place depuis 2005 le budget participatif des lycées, suivie par les
régions Nord-Pas-de-Calais14 où 25 établissements participent à une expérimentation laissant à la communauté scolaire décider jusqu’à 100 000 euros.
2007 – 2010 : développement des réseaux nationaux et internationaux (Brésil, Colombie, Argentine, Espagne, Grande-Bretagne) et vote des premières lois nationales rendant obligatoires les budgets participatifs.
2010 – 2015 : intégration des BP dans des mécanismes de participation plus larges (agenda 21,…)
Depuis cette expansion, de nombreux pays ont adopté par une loi l’obligation de décider une part du budget de manière participative, notamment la République Dominicaine, le Pérou, la Pologne et l’État du Kerala (Inde)ou le Sénégal,le Cameroun, Madagascar.
La Ville de Paris, en 2014, laisse les citoyens décider de 5% du budget pour la mandature 2014-2020.
Bref historique de Nelson Dias : « Esperança Democrática – 25 anos de Orçamentos Participativos no mundo, In Loco,‎ 2013«  (cliquez sur le titre pour le  lire en ligne)et Wikipedia .

CONCLUSION / ET POUR LE TOURISME ET LA CULTURE? Les élus et les administrations politiques des villes et des régions qui ont tenté le budget participatif font preuve d’une forme de courage en le mettant en place. L’abandon de « tout décider tous seuls » est donc louable. Des budgets participatifs pour le Tourisme et la Culture, deux secteurs qui ne peuvent se passer d’une bonne entente avec les habitants (le fameux « vivre ensemble »), sont-ils possibles? 
Les critiques, lors de telles consultations, fusent toujours de la part des « oppositions » politiques au pouvoir en place  » Appel au peuple démagogique!  » ou encore « Mais ce sont toujours les mêmes qui gagnent les projets! ».
C’est en effet le risque, pour la Mairie aussi : ne pas renouveler le vivier de propositions ou mal s’y prendre – la démarche est nouvelle à Paris depuis 2014 – et rater son coup. Cependant, partons du principe que faire confiance et évaluer « après coup » cette action vers davantage de démocratie est plus positif que d’accuser la mairie de mille maux avant même que ce partage sur le budget n’ait eu lieu!
Nous proposerions volontiers qu’une partie des budgets du Tourisme et de la Culture soit affectée aux habitants des villes, départements ou des régions. Cela renouvellerait le fonctionnement et la fréquentation des musées, monuments, Offices de Tourisme des villes, des départements ou des régions et améliorerait la qualité des rapports entre ces organismes et les habitants.
– Des exemples? Pour une exposition conçue, en principe, « pour tout le monde », ou encore pour réaménager l’accueil des visiteurs,c’est LE musée, LE monument ou l’Office du tourisme qui décide de tout , à partir de son budget : est-ce bien raisonnable? La « liberté de programmation artistique », par exemple, peut-elle régner seule en maître absolue, ne peut-elle pas, jamais,  être partagée?
On pourrait donc  imaginer, comme la Ville de Paris, que 5% de leur budget d’investissement serait consacré aux projets d’habitants.On  voit en ce moment à Barcelone, par exemple, que  les excès de certains touristes excèdent les habitants : pour continuer à être une ville touristique, quelles propositions feraient les habitants pour diminuer les abus de certains touristes?
Plus généralement, un budget participatif renouvellerait les pratiques et les stratégies de ces organismes et leur permettrait, tout simplement,  de prendre l' »air du temps » et de mieux partager leurs décisions.
Pas de tourisme sans consentement et appui des habitants, et pas de fréquentation culturelle élargie – elle reste l’apanage de 30% de la classe supérieure et aisée- sans changements structurels. La répartition et l’emploi des crédits disponibles, avec un peu plus de démocratie à la clef, ne serait-ce pas un vrai levier de transformation des politiques actuelles?
9782021236972 (1)POUR EN SAVOIR PLUS
– « Les budgets participatifs en Europe » et « Petite histoire de l’expérimentation démocratique », par Yves Sintomer aux éditions La Découverte. Voir son article sur  La Gazette des Communes .
Radicaliser la démocratie? Propositions pour une refondation par Dominique Rousseau – Date de parution 02/04/2015; 240 pages – Editions du Seuil :(15.00 € TTC).La démocratie a été happée par le principe de représentation, elle n’est pensée que par lui, elle en est devenue prisonnière. Elle a également été engloutie par le marché qui lui impose ses lois, comme le montre jusqu’à la caricature l’actualité. Pourtant, malgré la montée des populismes, la défiance à l’égard des élus et l’apparente indifférence politique, l’idée démocratique vit dans les quartiers, les villes, les écoles, les entreprises, portée par des collectifs informels de citoyens qui prennent en charge directement les questions qui les préoccupent et s’impliquent dans les grands débats de société.Ces expériences manifestent une forme nouvelle de démocratie qui n’a pas encore trouvé son nom.
Dominique Rousseau est professeur de droit constitutionnel à l’université Paris 1 Panthéon-Sorbonne. Ancien membre du Conseil supérieur de la magistrature de 2002 à 2006, il a été élu co-directeur de l’École de droit de la Sorbonne en 2013.
– Wikipedia sur les Budgets participatifs 

Ken budget participatifKEN LE TOURISTE PARFAIT, entre sept voyages et cinq palaces ce mois-ci, avait utilisé bon nombre de voitures, avions et jets privés, et se trouva fort dépourvu pour rejoindre son rendez-vous d’affaires à Paris à 9 heures. Il devait rejoindre le centre depuis Roissy Charles de Gaulle et voilà, pas de taxi…En bon Touriste parfait, il rêvait que des habitants viennent le chercher,mais voilà, les UBER n’étaient plus en odeur de sainteté dans cette capitale. Y-a-t-il une lectrice qui irait chercher Ken quand il vient à Paris?